
Voilà un livre surprise, au sens où je ne l’aurais jamais, mais alors jamais lu, sans l’article extrêmement incitatif d’Apophis. La faute déjà à une couverture assez anonyme au milieu des étagères assez fournies en couleurs des rayons SFFF. La faute aussi, je dois le dire, au fait qu’a priori la thématique et le type de livre ne me correspond pas complètement.
Mais bon, ce n’est plus à démontrer, je suis faible, et en voyant tant d’enthousiasme, je me suis lancé dans cette lecture.
Summerland, une uchronie mortelle d’espions, de guerre (très) froide, de Russie et d’Angleterre
Bon, ce n’est pas nouveau ici, je suis nul en résumé, et je n’ai vraiment jamais envie de spoiler. Et puis, c’est tellement bien fait ailleurs. Alors, je vais essayer de faire concis, et surtout de vous dire rapidement de quoi ça parle.
Le principal élément fantastique du livre est présent dès le titre, et il est d’importance : “Summerland“. Summerland est une sorte de version scientifique du paradis. C’est le “village des morts”. Et aussi le point de départ de cette uchronie. On a conquis la mort dès la fin des du 19ème siècle, compris son lien avec l’électromagnétisme, posé des concepts scientifiques derrière et désormais, quand on meurt physiquement, on peut parvenir à rejoindre “Summerland”. Cette ville où on pourra vivre a priori indéfiniment, avec son esprit conservé, et sans perdre le contact avec le monde des vivants.
Le deuxième élément d’importance du livre est… hé bien, son histoire, et plus exactement son histoire d’espionnage. On est en 1938, dans une version alternative de l’histoire. Version marquée par l’affrontement larvé entre la Russie – et sa propre version de la conquête de la mort -, et l’Angleterre. Version marquée par l’existence de Summerland. Et on va assister à une guerre d’espion, dans un contexte de potentielle explosion d’un conflit à la portée internationale.
Une uchronie solide et passionnante…
Et voilà à dire vrai pourquoi ce n’est pas complètement mon type de livre : je ne suis pas franchement branché roman d’espionnage, pas franchement branché uchronie non plus (nul n’est parfait :)). Et pourtant, j’ai trouvé beaucoup de qualités à ce livre.
Commençons par le début : les conséquences de l’existence de Summerland. La façon dont l’auteur construit un univers cohérent, complet, tirant un gros parquet de conséquences de ce postulat de départ, l’existence de cette vie après la mort, est un vrai point fort. C’est bien sûr un minimum pour une uchronie, mais ce n’est pas si facile, surtout qu’on ne parle pas ici d’imaginer la mort d’un personnage principal de l’histoire réelle, on parle carrément de dompter la mort dès le 19e siècle ! Ce n’est donc ni facile, ni évident de réussir à construire ce monde cohérent. Et pourtant, c’est à mon sens parfaitement réussi : on s’y sent, on y croit, et on réfléchit même avec l’auteur à toutes les conséquences.
… mais aussi très agréable à lire
Ce qui m’amène au point deux : on se sent “bien” dans cet univers. Pas tant au sens qu’on aimerait y vivre, mais au sens où le rythme, le style, la qualité d’écriture des personnages, tout cela conduit à ce que le livre ne fasse pas seulement réfléchir : il est agréable à lire. Apophis parlait de roman exigent, et c’est sans doute le cas si on veut bien comprendre les ramifications, et rentrer dans le jeu de l’uchronie. Mais ça n’empêche pas le roman de se lire à mon sens très facilement, et avec beaucoup de plaisir.
… et qui est vraiment de la SF
Le dernier point principal est un point que je vais assez peu mentionner pour ne pas spoiler. Disons que pendant un certain temps, on suit une histoire d’espions dans un univers alternatif, bien que similaire, s’appuyant sur un postulat un peu fou mais aux apparences crédibles. Et puis, à un moment du roman, on commence à se demander si ce n’est pas plus que cela. Pas étonnant pour une histoire d’espion avec tiroirs, évidemment. Mais bon. Je n’en dirais pas plus.
Dans l’ensemble, je ne peux que remercier Apophis de cette découverte, car on a là un très bon roman. Une uchronie d’espionnage, rythmée, jouant avec cette idée que la mort peut être domptée. C’est intelligent, c’est bien écrit, et on passe au final un moment très agréable. Je n’irais pas jusqu’à le placer pour un titre de roman SFFF de l’année – car ce n’est pas vraiment ma tasse de thé initiale -, mais c’est un vrai bon roman. Et clairement, par ailleurs, si vous aimez les uchronies, la question ne se pose même pas, au point que je me demande ce que vous faites encore là ?
Autres avis : Apophis (sur la VF et de façon plus détaillée sur la VO), Epaule d’Orion, Celindanaë