
Voilà une lecture des plus perturbantes (entre beaucoup d’autres choses)…
Imaginez que vous avez vu, ou lu, Ready Player One. Vous en sortez avec l’idée que la réalité virtuelle, à bonne dose, ça peut être sympa. Et puis que c’est quand même super cool de se promener dans un monde qui offre tant de possibilités, que les références geeks c’est quand même classe, et que vous dans ce cas vous auriez acheté une Delorean et roulé à toute vitesse comme dans GTA. Bref, qu’il faudra faire attention, mais que les casques virtuels c’est quand même bien sympa.
Et puis, vous tombez sur ce petit livre de Jean Baret. Qui, concrètement, part du même principe : on peut se perdre dans un monde virtuel. Mais qui le pousse à son extrême jusqu’à ses plus obscurs détails et défauts. Et vous obtenez “Vie”.
“Vie”, c’est l’histoire d’un homme, un certain “Sylvester Staline” (le nom est bien sûr volontaire, mais tous les noms dans ce livre sont du même acabit). Sylvester vit dans un mondes, hum, “parfait” ? Une vraie utopie. Un boulot pas fatigant. Des rapports sexuels réguliers, des amis à la demande, des loisirs quantifiés mais bien présents, et avec des possibilités infinies. Vraiment, une utopie. Seul point de détail à avoir en tête ? Sylvester est enfermé, comme le reste de l’humanité a priori, dans une pièce. Relié en permanence à un monde virtuel, via des machines physiques qui lui sont branchées et s’occupent de (vraiment) tout. Et sa vie est guidée par une recherche du bonheur, conçu comme un équilibre parfait entre travail, loisirs, et amour (entendez “sexe”, ce sera plus juste). Recherche dictée par des “algorithmes”, qui décident de tout. Et le roman vous propose de suivre Sylvester dans sa façon de vivre cette vie pensée pour lui et dans laquelle, spoiler, il ne se sent pas complètement à sa place.
“Vie” est un roman que j’ai trouvé complètement allumé. Complètement barré si j’osais. Complètement effrayant plus probablement. Cette dystopie est à la fois très réaliste – franchement, je trouve que c’est très possible – et absolument traumatisante. Ce monde du futur dans lequel les algorithmes – oui oui, les mêmes qui régissent déjà beaucoup de choses, comme ce que vous regardez, voire consommez – ont pris en main la destinée humaine pour la figer dans une béatitude permanente, ce monde fait peur.
“Vie” est un roman sans limite. Où l’on se retrouve plongé dans des détails d’ébats sexuels tellement banalisés que les formules de politesse ont pris une connotation étonnante (“à plus on se suce” ?!), où les loisirs consistent en une succession de possibilités toutes plus choquantes les unes que les autres, où le loisir principal du héros consiste à se suicider.
“Vie” est un roman à ne pas mettre entre toutes les mains, mais à mettre entre certaines mains quand même. Il est peur, mais il est fort. Et puis, accessoirement, il se lit vraiment tout seul avec un style agréable, et un rythme soutenu. Un peu de type Novella j’ai trouvé.
Bref, j’ai bien aimé cette dystopie, même si je ne la relirais pas tous les jours : trop déprimant. Sacré livre en tout cas, qu’il est intéressant de découvrir. Mais accrochez vous quand même, car cette vie rêvée est sacrément… à part !
Points positifs :
- Une dystopie qui tient la route, et qui se lit (très) agréablement
- Une vraie réflexion sur ce monde – c’est l’objet du livre -, avec la présence de personnages importants
- Un humour, un ton, une folie qui peut vraiment créer le coup de coeur je pense
Points négatifs :
- Format plus novella je trouve, donc un seul vrai personnage – vraie sensation de huis clos quand même -. Ce n’est pas négatif en soi, mais c’est notable
- Déprimant, mais je suis une petite nature
Si vous avez aimé ?
- Franchement, à ce niveau de causticité, je ne sais pas. J’aimerais beaucoup avoir des idées en commentaires !
Pour d’autres avis sur ce livre, vous pouvez consulter : L’Epaule D’Orion, Au Pays des Caves Trolls, Les Chroniques du Chroniqueur, Quoi de Neuf sur ma Pile, La Bibliothèque d’Alinael, Boojum, Lorhkam,